Ihn Kyang était… A la piscine ! Mais attention hein : il n’y était pas pour se baigner ! En fait, les deux longues et somptueuses piscine du navire n’avaient que très peu d’intérêt à ses yeux. Le fait était qu’il était cinq heure du matin, que le bateau semblait comme désert, abandonné… Et qu’en s’en rendant compte, Ihn Kyang avait eu envie de sortir un peu pour faire quelques pas dans cette ambiance très particulière. Le joueur d’échecs était sociable mais malgré tout il savait apprécier le silence à sa juste valeur et au-delà de ce détail, l’air marin était paraît-il un très bon remède à bien des maux. Peut être même aux maux de l’âme, qui sait ?
Après avoir déambulé un peu, ne croisant là que quelques très très rares passagers et quelques membres du personnel, Ihn Kyang s’était finalement arrêté à la piscine, donc. Il était assit en tailleur sur l’une des chaises longues qui bordaient l’une d’elles et était resté un moment les yeux dans le vague (sans mauvais jeu de mots !) à observer la brise marine légèrement qui faisait onduler la surface de l’eau. A ses oreilles ne parvenait que le bruit du ressac contre la coque du navire et le léger ronron des moteurs qu’une foule habituellement dense camouflait. En fait, tout ceci lui aurait presque donné envie de dormir.
Le temps était clair, le soleil s’était levé tôt et le fait qu’il soit encore bas et pâle lui permettait de supporter une petite veste bien agréable pour cette étape de la traversée. A côté de lui, sa tablette reposait, élément incontournable de ses déplacements. Pour l’heure, elle était encore éteinte mais bientôt, il allait s’offrir le luxe de l’allumer pour profiter un peu de ce moment privilégier afin d’être dans de bonnes conditions pour… Jouer aux échecs. On ne se refaisait pas, comme on dit, et si Ihn Kyang avait choisit ce navire là pour voyager, c’était entre autre à cause de sa connexion en wifi qu’on lui avait assuré fiable (et qu’il était, pour ce qu’il avait commencé à la tester).
D’ici une heure ou deux, lorsque les plus matinaux commenceraient à investir piscine et terrasse pour un petit déjeuner au grand air, Ihn Kyang s’en retournerait dans sa chambre. Les femmes de chambres seraient probablement passées, profitant de son évasion des lieux et ainsi tout le monde serait content, y comprit cette grande pipelette blonde qui était venue insister pour qu’il laisse les femmes de ménage venir faire ce pour quoi elles étaient payées. Tout irait bien dans le plus parfait des mondes, tout serait sous contrôle et le contrôle, pour un joueur d’échecs traumatisé et peut être bien un brin névrosé, c’était un truc important, voyez ?
Bref… La quiétude de l’endroit était parfaite, jusqu’à ce que de petits pas se fassent entendre. Ihn Kyang ne bouge pas au départ, les yeux toujours posés sur une ride invisible de la surface de la piscine. Peut être avait-il cru, coincé dans sa bulle perso, que ce n’était pas vers lui que ces pas allaient. Pourtant ils se rapprochent… Puis s’arrêtent… Et Ihn Kyang tourne finalement la tête sur… Une jeune femme. Petite et menue, elle avait le type coréen évident quoi qu’elle ne lui semblait pas entièrement dans ce trip un peu surprenant de la maigreur maladive et excessive. Soyons clair : elle était loin, très loin d’avoir de l’embonpoint ! Elle aurait sans doute même pu prendre quelques bons kilos avant que ça n’arrive ! Mais elle n’avait pas l’air de risquer de s’envoler au premier souffle de vent non plus et ses cuisses étaient pourvues de quelques formes agréables qui lui donnaient un taille-fesses-cuisses en forme de cœur. Beaucoup plus attrayant que ces baguettes squelettiques auxquelles la mode coréenne l’avait habitué. Et pourtant, au milieu de ces constatations diverses, il était important que l’attrait d’Ihn Kyang n’était pas spécialement marqué. Il s’agissait de constatation sobre, presque gratuite d’un observateur qui, parfois, rebranchait avec le monde normal.
D’ailleurs une fois sa petite inspection faite, Ihn Kyang semble oublier jusqu’à la présence même de ce petit bout de femme, en revenant à l’eau de la piscine. Se passe peut être une poignée de seconde et tandis qu’elle semble sur le point d’interagir avec lui, Ihn Kyang se tourne à nouveau sur elle, un petit air surprit sur le visage comme s’il ne s’était pas attendu à la trouver encore là !
◘ Est-ce que c’est une manie sur ce bateau de venir me parler ?
Le ton n’était pas désagréable non. Juste réellement très surprit. Ses bizarreries revenaient certainement un peu au galop et l’exagération les accompagnait puisque jusque là, cette jeune femme était seulement la seconde personne à lui parler. En même temps, pour que ce soit différent, il aurait fallu qu’il sorte de sa chambre, n’est-ce pas ?
Elle avait un visage ovale, dans la longueur, d’une pâleur un brin excessive à son goût et ses yeux en amande, petit, étaient enfoncé entre deux rangées de cils bien noirs.
◘ Je peux vous aider ?
Puis montrant le tour de la piscine, sans sarcasme dans la voix, il signale :
◘ Vous pouvez vous assoir, il y a de la place.
Et pas qu’un peu ! Puis comme s’il devait se justifier, Ihn Kyang montre sa tablette, expliquant :
◘ Je vais jouer aux échecs et puis je m’en vais.